La mode est un mensonge


La mode est un mensonge auquel tout le monde veut croire.

Les symptômes du mal sont connus nous recherchons l'originalité et nous voilà soumis à l'uniforme de la dernière nouveauté, oubliant notre sens critique et notre crainte du ridicule. Les " tendances " justifient tout : le retour des années 1980, l'arrivée des tongs, la vogue du treillis...

Or les fashion victims ne sont pas seules à succomber; nous sommes tous soumis à l'emprise de la mode, parfois à notre insu et même contre notre gré. Doit-on alors accuser les marques ou les créateurs de manipuler la société par des mécanismes diaboliques? Ce serait oublier qu'ils sont eux aussi victimes de la mode. Sommés de découvrir avant tout le monde quelles seront les prochaines tendances, ils sont confrontés à un enjeu vital : s'ils se trompent, ce n'est pas un vêtement qui finira au placard, mais leur réputation ou leur carrière.

Original et documenté, l'ouvrage Victimes de la mode ? : Comment on la crée, pourquoi on la suit ? nous fait découvrir les ressorts cachés d'un univers qui demeure énigmatique. Qui crée les tendances? Comment se diffusent-elles? Et enfin, pourquoi tolérons-nous cette servitude? Car, en réalité, il n'existe qu'une seule personne suffisamment forte pour nous contraindre à suivre la mode : nous-même. " Un document qui mêle à merveille la drôlerie à l'intelligence.

Erner applique à sa littérature les règles éprouvées du monde des tendances : susciter la demande, créer la pénurie, laisser sur sa faim pour relancer l'intérêt de la démonstration. Quel talent dans ce jeu de passe-passe entre la "fashion-victim" et son maître !

Sociologue des tendances (entre autres), Guillaume Erner se penche, en esthète connaisseur, sur les petits et les grands travers de la mode dans un ouvrage incisif qui montre que le sujet est loin d'être futile. Il nous rappelle la capacité des créateurs - puis des marques qui continuent après eux - à se mettre en scène, bref à nous raconter de belles histoires (c'est du pur storytelling !) mais aussi que l'idée qu'on se fait de la mode repose sur un malentendu : on croit que les "créateurs créent la mode" alors qu'ils ne font que - au mieux, l'incarner, au pire - la suivre. Les marketeurs et les "happy few" auraient d'après lui réussi un beau tour de passe-passe en nous faisant croire qu'ils gouvernent les tendances alors qu'ils sont obsédés par le fait de les laisser passer sans les avoir identifiées.

Il nous explique aussi de manière tout à fait convaincante que les goûts sont beaucoup moins irrationnels qu'on ne le dit (pour faire simple : un "bon" parfum se vendra toujours mieux qu'un "mauvais" quel que soit l'univers onirique qu'on crée autour de lui) et enfin voit dans la mode la possibilité de rapprocher les hommes et non de les opposer. N'attendez pas les soldes pour lire ce livre !
 

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